Les nouveaux mythes
Publié le par Catherine Heurtebise
Beau succès pour la Journée Nationales des Etudes : plus de 220 participants et un contenu qui a soulevé de nombreux débats. Introduction de la journée par Georges Lewi. Bienvenue dans “Bovary21”, le pays enchanté et marketé des followers.
“Avis de tempête sur les études ?“, la question mérite en effet d’être posée et laJournée Nationale des Etudes, co-organisée par l’UDA et l’Adetem le 23 janvier dernier en a fait a thématique. Et même si la journée n’a pas permis de répondre entièrement à la question, elle a soulevé de nombreux débats, des neurosciences à l’évolution des métiers des études en passant par le big data, l’innovation, les réseaux sociaux…
Il se présente comme mythologue, consultant et essayiste. Spécialiste des marques, auteur d’une douzaine d’ouvrages Georges Lewi a joué avec brio son rôle de keynote speaker de la journée. Dans son roman “Bovary21” (François Bourin, 2013), Georges Lewi prolonge la réflexion entamée dans “Les nouveaux Bovary” (Pearson, 2012) : le mythe de l’illusion de “la génération Facebook”, les post-génération Y. Illusion de la rencontre, du féminin, de la transparence et de la minute de gloire. L’histoire de Bovary21, une jeune femme, qui se croit en ligne directe de l’égérie de Flaubert, blogueuse reconnue, “marketeuse” pour une grande marque de soda, est en effet le roman de l’illusion d’une génération qui fait du marketing.
“Pour cerner cette génération Bovary, j’ai interrogé 200 jeunes entre 15 et 24 ans et j’ai découvert une génération très différente des Y. C’est d’abord la génération de larencontre, de la micro communauté. Même quand vous leur proposez un job, ils demandent à leurs amis et les écoutent ! Ce partage est très nouveau. Depuis 68, nous n’avions pas connu de micro-blocs éclatés. C’est une société en rhizome. Second point : c’est la génération transparence. Elle a pris l’habitude de se mettre à nu. Troisième caractéristique : c’est une génération féminine. D’après une étude américaine, 74% des blogs sont lancés et tenus par des filles. Il y a certes beaucoup de mode, de cuisine… mais même pour le Printemps Arabe, ce sont les femmes qui étaient en avance sur les réseaux sociaux. Ce sont vraiment des Influent Mums. Mais revers de la médaille, les femmes sont harcelées sur les réseaux sociaux !
Ces trois piliers nous apportent trois éléments de base. La transparence entraîne l’équité (de plus en plus de demandée dans l’entreprise). L’équité, ce n’est pas l’égalité. Cette génération n’est pas dans la revendication égalitaire mais dans la revendication logique, celle de Davos. Rencontre et partage sont des valeurs de sérendipité, de hasard heureux. L’optimisme de cette génération vient de là. Le féminin nous conduit à une clé de lecture différente. Les filles disent ce qu’elles ne veulent pas. Pour une marque, ce sera de définir ce qu’elle ne veut pas être. Le féminin entraîne un droit à l’ailleurs. Quant à la transparence, elle favorise le droit à la minute de gloire. Si Georges est sur l’estrade, je veux y être moi aussi ! L’exemple The Voice : 100 000 jeunes qui font la queue et un seul glorifié !
Les mythes sont toujours là même s’ils prennent des formes différentes. Je travaille sur la recherche du mythe d’une marque. Un mythe existe par le croisement de plusieurs mythèmes, éléments constituants du mythe, selon la définition de Claude Levi-Strauss. Un mythe est construit selon un schéma d’oppositions binaires. C’est par exemple d’un côté Cosette, symbole de la petite fille dominée et de l’autre les filles de la Comtesse de Ségur, tyrans et dominantes. Ces mythes existent dans la tête des gens. Les nouveaux Bovary, génération de la résilience, commencent à regarder que les choses soient aussi équitables que possible, en commençant par la parité dans les entreprises. De nouveaux mythes se construisent”.
La jeune femme est-elle condamnée au même destin que sa lointaine aïeule ? Emma Bovary était bien seule. Les “amis” Facebook de Bovary21 vont-ils l’empêcher de mourir ? Qui a dit qu'”un mythe, c’est une continuité” ? Réponse : Georges Lewi.